INRAP
Source - http://www.inrap.fr/archeologie-preventive/Actualites/Communiques-de-presse/p-16191-Des-occupations-gauloises-et-une-chapelle-commemorative-de-la-guerre-de-1870-a-Villers-Bretonneux-Somme-.htm
Vue d’ensemble du site de l’âge du Fer au premier plan ; le village de Villers-Bretonneux au second plan . © http://refuveille. balloide-photo.com
Des équipes de l’Inrap mènent depuis février 2013 plusieurs fouilles archéologiques à Villers-Bretonneux, en préalable à l’aménagement d’une zone d’activités par la Communauté de communes du Val de Somme. Prescrites par l’État (Drac de Picardie), les quatre zones à investiguer représentent une surface cumulée de 2,26 hectares. Les deux premières fouilles déjà réalisées ont permis de découvrir un espace d’habitat de la culture de La Tène ancienne (Ve siècle avant notre ère) et une nécropole du IIIe siècle avant notre ère (La Tène B2/C1). Les deux sites actuellement en cours de fouille révèlent une seconde zone d’habitat légèrement plus récente que la première (IVesiècle avant notre ère) mais aussi les vestiges d’une chapelle commémorative de la guerre de 1870.
Les découvertes archéologiques confirment la richesse des occupations protohistoriques de ce secteur de la Somme, déjà mise en évidence par les interventions réalisées depuis une quinzaine d’année, notamment à Villers-Bretonneux (gazoducs, autoroute A29, lotissements, zones d’activités). Aujourd’hui, les recherches offrent l’opportunité de compléter nos connaissances de ce territoire et de suivre l’évolution des occupations humaines sur plusieurs siècles. La fouille inhabituelle des vestiges d’une chapelle de la fin du XIXe siècle permettra quant à elle de relever les informations matérielles d’un édifice de souvenir exclusivement connu grâce à des sources d’archives.
Deux zones d’habitat de l’époque gauloise
Vestiges de trous de poteaux, témoins d’une construction en bois de l’époque gauloise. © Lydie Blondiau, Inrap
Une des deux zones fouillées en début d’année 2013 a montré l’existence d’un habitat de La Tène ancienne, aménagé autour d’un espace central inoccupé. Les vestiges archéologiques découverts sont essentiellement des trous de poteaux, traces en négatif de l’emplacement des anciens poteaux de bois qui soutenaient les constructions. Celles-ci sont des habitations ou des greniers surélevés, destinés à conserver les denrées alimentaires.
Des silos enterrés, établis à l’écart de la zone construite, complètent le dispositif.
Un silo creusé en forme de cloche, destiné à conserver les récoltes (époque gauloise). © Lydie Blondiau, Inrap
Pour cette période, le département de la Somme livre souvent ce type de vestiges assez modestes et difficiles à détecter, donc rarement fouillés. Les archéologues ont donc ici l’occasion de mieux connaître cette période.
Un second espace d’habitat est actuellement fouillé sur près d’1 hectare. Plus récent, il date du IVe siècle avant notre ère, mais présente le même type de vestiges : des trous de poteaux et des silos enterrés, dont certains, de grande dimension, sont creusés « en cloche ». Cependant, à la différence de la première zone fouillée, les espaces semblent ici moins sectorisés, de petits silos enterrés accompagnant les habitations. Les quelques tessons de céramique retrouvés permettront aux archéologues de dater plus finement ces occupations et d’en établir la chronologie.
Une nécropole gauloise
Tombe à incinération perturbée par l’explosion d’un obus à proximité, pendant la guerre 1914-1918. © Lydie Blondiau, Inrap
Une nécropole du IIIe siècle avant notre ère, fouillée entre mars et avril 2013, a révélé la présence d’une vingtaine de tombes à incinération et à inhumation. Les tombes à incinération, de différentes tailles, sont disposées autour d’une tombe centrale plus grande, qui pourrait être considérée comme fondatrice. La quantité et la qualité des offrandes contenues dans ces tombes sont, elles aussi, variables : certaines ne contiennent qu’une seule céramique alors que d’autres en comportent plusieurs, accompagnant les restes d’ossements brulés du défunt.
Tombe à incinération de petite dimension : à droite, le dépôt osseux et à gauche une céramique. © Lydie Blondiau, Inrap
Outre ces dépôts, quelques objets d’accompagnement, comme une perle en ambre ou des fibules mal conservées, ont été mis au jour. Les tombes à inhumation étaient établies à l’écart de celles à incinération : l’étude par un anthropologue des quelques ossements et dents mis au jour permettra peut-être d’en savoir davantage sur ces défunts (âge ? sexe ?) et de nous éclairer sur le choix de cette organisation spatiale.
Tombe à incinération (dépôt en bas à gauche) avec plusieurs céramiques en offrande.© Cécile Durin, Inrap
Une chapelle commémorative de la guerre de 1870
Les vestiges d’une chapelle commémorative de la bataille du 27 novembre 1870 ont été découverts. Inaugurée le 7 juillet 1872, elle avait été construite en mémoire des soldats français de l’Armée du Nord tués en ce lieu. Un monument érigé dans le cimetière communal de Villers-Bretonneux rappelle les mêmes évènements. En 1918, la chapelle est rasée lors des combats ; elle est remplacée par un nouvel édifice en béton en 1928, sans que nous puissions confirmer qu’il le fut sur le même emplacement. Ce second édifice est lui-même détruit en 1972.
Fondations de la chapelle commémorative de la guerre de 1870. © http://refuveille. balloide-photo.com
Les fondations de brique et de moellons de pierre de la première chapelle ont été dégagées dans leur intégralité par les archéologues. Elles révèlent le plan de l’édifice, en forme de croix latine, marqué par des contreforts, ainsi que ses dimensions : 9,60 m. de long et 5,70 m de large. Parmi les matériaux de construction retrouvés dans des fosses adjacentes, des appareils de pierre et des fragments de décors peints (étoiles bleues à bords dorés sur fond blanc) permettront de se représenter l’édifice, uniquement connu grâce à des cartes postales anciennes. La fonction d’un petit fossé circulaire entourant l’édifice n’a pas encore pu être déterminé mais il pourrait correspondre à un fossé/talus planté d’arbres que l’on devine sur certains clichés anciens. La fouille de vestiges aussi récents est assez inhabituelle, elle montre que les méthodes de l’archéologie peuvent être appliquées à des structures récentes, en apportant des données que les sources historiques ne mentionnent pas forcément.
Aménagement : Communauté de communes du Val de Somme
Contrôle scientifique : Service régional de l’Archéologie (Drac Picardie)
Recherche archéologique : Inrap
Responsables scientifiques : Cécile Durin, Pierre-Yves Groch, Inrap
Coordinateur scientifique : Lydie Blondiau, Inrap