PART.2
L’autopsie : enjeux scientifiques et patrimoniaux
Scanner d'un corps exceptionnellement bien conservé découvert dans un cercueil de plomb mis au jour au couvent des Jacobins, à Rennes (Ille-et-Vilaine), 2015. Un premier scanner du corps entier habillé est réalisé pour évaluer le degré de conservation des tissus organiques, non visibles sous les habits.© Rozenn Colleter, Inrap
Après le scanner de l’intégralité de la dépouille, l’autopsie a révélé l’état sanitaire de Louise de Quengo. Le prélèvement de tissus humains sans contamination environnementale est une opportunité rare en archéologie. Des études complémentaires en microbiologie ou en génétique permettent de déterminer si la cause du décès est d’origine infectieuse. L’ADN des pathogènes, dont celui de la tuberculose, permet d’observer l’évolution des micro-organismes du XVIIesiècle à nos jours, une problématique en plein essor.
Ces recherches apportent aussi de précieuses informations sur les pratiques funéraires de l’époque, l’histoire des sciences et de la médecine. Le prélèvement du cœur de la défunte révèle ainsi une réelle maîtrise de la pratique chirurgicale. Il a probablement été inhumé dans un lieu encore inconnu, celui de son époux l’accompagnant dans l’au-delà.
L’inhumation en plusieurs lieux de différentes parties d’un corps puise ses origines dans le Moyen Âge, comme en témoignent les funérailles de Bertrand Du Guesclin ou Anne de Bretagne. Mais ses modalités et son évolution à l’époque Moderne étaient jusqu’alors méconnues.
Un costume complet du XVIIe siècle
Louise de Quengo porte l’habit de religieuse : cape, chasuble, robe de bure brune en sergé de laine grossier, chemise en toile, jambières ou chausses en sergé de laine et mules en cuir à semelles en liège.
Chausses à boutons restaurés ayant appartenu à Louise de Quengo, dont le corps a été découvert dans un cercueil en plomb dans le couvent des Jacobins, Rennes (Ille-et-Vilaine), 2015. © J. Guerrier, Materia Viva, Inrap
Chausse découverte sur le corps de Louise de Quengo mis au jour dans un cercueil de plomb au couvent des Jacobins, Rennes (Ille-et-Vilaine), 2015. Après restauration, la chaussure a retrouvé une partie de son aspect originel, montrant une semelle en bois et le dessus en cuir. © Céline Bonnot-Diconne, 2CRC Materia Viva, Inrap
Un scapulaire de dévotion est enroulé autour de son bras droit, ses mains jointes tenant un crucifix. Un suaire recouvre son visage et deux bonnets et une coiffe, maintenue par un bandeau, couvrent sa tête.
Trois bonnets restaurés ayant appartenu à Louise de Quengo, dont le corps a été découvert dans un cercueil en plomb dans le couvent des Jacobins, Rennes (Ille-et-Vilaine), 2015. © J. Guerrier, Materia Viva, Inrap
Le port de l’habit religieux est répandu chez les élites laïques, autorisées à l’endosser lors de cérémonies importantes. Mais Louise a pu aussi adopter la vie monacale après son veuvage. La conservation exceptionnelle de l’ensemble a conduit l’État et le musée de Bretagne à mettre en œuvre la restauration des vêtements (laboratoire Materia Viva à Toulouse) et des chaussures (laboratoire 2CRC à Grenoble), en vue d’une présentation au public.
Á l’issue des études scientifiques, des dispositions seront prises en vue de la ré-inhumation de la défunte, ainsi que pour la conservation des textiles.
REPORTAGE VIDEO =
http://www.inrap.fr/archeologie-preventive/Ressources/p-19590-La-sepulture-de-Louise-de-Quengo-dame-du-XVIIe-siecle.htm
http://www.theguardian.com/world/video/2015/jun/03/autopsy-350-year-old-body-french-noblewoman-timelapse-video?
Maître d’ouvrage : Rennes Métropole
Contrôle scientifique : Drac Bretagne
Recherche archéologique : Inrap
Responsable scientifique de la fouille : Gaétan Le Cloirec, Inrap
Anthropologue : Rozenn Colleter, Inrap