Reims (France): une belle demeure appartenant à l'élite du IIIe siècle

Le sol de Reims livre de nouveaux trésors

Grégoire Amir-Tahmasseb / Photos Hervé Oudin

Source - http://www.lunion.presse.fr/article/autres-actus/le-sol-de-reims-livre-de-nouveaux-tresors

Les archéologues de l'Institut national de recherches archéologiques préventives viennent de mettre au jour à Reims une demeure du IIIe siècle dans un excellent état de conservation. On y trouve notamment encore les principaux éléments d'un système de chauffage romain et de rares enduits peints figuratifs.

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« Dès qu'on fouille à Reims, c'est grandiose… » Yoann Rabasté ne s'en lasse pas ! Archéologue à l'Inrap  et responsable de l'opération en cours rue Ponsardin à Reims, le jeune homme affiche un large sourire. Une fois encore, le travail des spécialistes dans le cadre de fouilles préventives a permis de mettre au jour de petits trésors de l'histoire rémoise.
Son équipe intervient depuis le 20 août sur un site situé à proximité du centre de la cité des sacres. Sur place, un projet d'immeuble avec 22 logements, deux niveaux de parking en sous-sol et 400 m2 de cellule commerciale doit voir le jour à l'horizon fin 2013-début 2014. En attendant, les archéologues de l'Inrap ont quelques semaines pour essayer de tirer au mieux profit des lieux, l'ensemble devant être laissé libre pour le promoteur à la mi-octobre.
Une demeure d'au moins 300 m2
« Nous sommes situés au sud-est de ce qui était la ville antique de Reims, explique Yoann Rabasté. Nous avons découvert ce que nous appelons une domus, une belle demeure appartenant à l'élite du IIIe siècle relativement bien conservée. » Selon les premières constatations, la demeure, dont une seule partie a été mise au jour (300 m2 tout de même), était à proximité de l'enceinte de l'antiquité tardive à Reims.
Trois pièces donnant sur ce qui était sans doute une cour centrale ont été recensées. Une première de 14 m2 avec un sol en béton romain, un terrazo, a été dégagée. Une deuxième de 9 m2 contient les restes d'un plancher en bois dont des fragments ont été conservés « grâce » à un incendie à l'époque.
Autre élément fort de cette fouille, une salle avec un chauffage au sol romain (un hypocauste) qui est dans un état de conservation assez remarquable. Des tuiles empilées forment des colonnes d'environ 50 centimètres de hauteur qui supportaient le sol, et autour desquelles circulait un air chaud, alimenté par un foyer annexe. Seule la pièce de vie principale ou les thermes d'une maison romaine luxueuse bénéficient de ce type d'installation.

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« On trouve souvent des hypocaustes mais rarement dans un si bel état. C'est sans doute un des mieux conservés de Reims. Cette pièce était la seule chauffée de la maison. Cela pouvait être une salle de bains ou une pièce à vivre, une seconde option tout à fait possible avec la vue depuis cet endroit sur la cour intérieure. »

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Enduit peint avec un visage
Du mobilier a aussi été trouvé sur place avec quelques monnaies, des petits objets en bronze, des épingles à cheveux en os ainsi que beaucoup de céramiques (bols, cruches, assiette…). Le col d'une belle amphore qui devait faire dans les 1m20, 1m30 a également été découvert.

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L'intérieur de la pièce où se trouvait l'hypocauste était recouvert d'une couche de remblai de démolition de plus d'un mètre d'épaisseur, qui contenait de nombreux fragments d'enduit peint. Une trentaine de caisses de décors, aux motifs divers, floraux ou géométriques, a ainsi été prélevée durant la fouille : un ensemble exceptionnel pour l'étude de la décoration intérieure des domus. « Parmi tout cela, on a notamment un décor remarquable avec un visage aux traits fins. C'est très rare, voire unique, sur Reims de retrouver ainsi des décors figuratifs. »
Outre tous ces éléments, la qualité de conservation de la demeure pourrait aider les spécialistes à mieux dater la construction du rempart de l'antiquité tardive. En effet, beaucoup de maisons de ce type ont été détruites à l'époque pour construire cette enceinte de Reims et on manque encore de données précises aujourd'hui (voir par ailleurs).
D'ici la fin des fouilles préventives, programmée pour le 12 octobre, Yoann Rabasté et son équipe vont réaliser un troisième décapage du site. Après un premier qui a mis au jour une petite pièce médiévale, le second qui a permis de ressortir les différents éléments de la domus, le troisième permettra d'étudier l'occupation des lieux à l'époque gallo-romaine. Et pourquoi pas avec de nouvelles belles surprises ?