Nîmes (France) : Le Forum des Carmes

 

Forum des Carmes : les fouilles s’achèvent, des mystères restent

Edith Lefranc

Source - http://www.midilibre.fr/2011/09/20/forum-des-carmes-les-fouilles-s-achevent-des-mysteres-restent-comprendre-la-vie-medievale-quatre-cent-trente-squelettes-etudies,390616.php 

 

 

Montrer à un visiteur étranger arrivant en ville, l’opulence de celle-ci passait par la présence de monuments, arcs de triomphe, colonnes, etc, mais les nécropoles pouvaient aussi remplir cette fonction. (© D.R)

Riche dépotoir Pour un archéologue, tomber sur un dépotoir est un vrai bonheur : l’occasion de trouver de petits objets. Ce minuscule dé à jouer, en os, parfaitement conservé depuis 2 000 ans était-il tombé d’une poche ou jeté dans un coin ? Plan com’ ? Enterrer les morts le long des voies - et à l’extérieur de l’enceinte - était d’usage à l’époque romaine. Divers chantiers route de Beaucaire (qui suit le tracé de la via Domitia) l’ont montré.

Idem à l’autre extrémité de la voie, du côté de la porte du Cadereau. Montrer à un visiteur étranger arrivant en ville, l’opulence de celle-ci passait par la présence de monuments, arcs de triomphe, colonnes, etc, mais les nécropoles pouvaient aussi remplir cette fonction. Les mausolées en bordure de chantier jouaient probablement ce rôle. Sans oublier un aspect pratique : deux fêtes annuelles invitaient à se rendre sur la tombe du défunt, sans compter l’anniversaire de sa mort où l’on allait manger à ses côtés. Une nécropole facilement accessible, en bordure de voie, était sûrement utile.

ANTHROPOLOGIE / ARCHEOLOGIE

Tombe féminine

Dans ce coffre funéraire, on a trouvé des petits pots à onguents, une épingle à cheveux, un miroir, d’où la conclusion que c’est une tombe féminine. La crémation laisse hélas peu de possibilité d’études, contrairement aux squelettes de l’époque médiévale (lire ci-contre).

À l’occasion des Journées du patrimoine, les archéologues de l’Inrap (Institut national de recherches archéologiques préventives) ont proposé une dernière journée portes ouvertes sur le chantier de fouilles des Carmes. Un chantier qui se termine dans un mois et qui, à défaut d’avoir mis au jour des choses spectaculaires (pas de mosaïque comme sous le Jean-Jaurès) n’en présente pas moins un grand intérêt. Pour la première fois en effet à Nîmes, un cimetière médiéval va être entièrement étudié (lire ci-dessous).

Mais ces dernières semaines, c’est la période antique qu’ont fouillée les spécialistes. "On a ici la présence de deux établissements d’activités artisanales, dont l’un avait aussi une activité agricole. Était-ce une teinturerie ? Une tannerie ? Nous n’avons pas trouvé de restes de cuir ou de tissu qui nous permettraient de l’affirmer. Peut-être trouverons-nous dans la fouille des trois puits que nous allons entreprendre en fin de chantier, ces restes organiques ou des insectes qui se développaient au contact des peaux et qui nous en diront plus", souligne Odile Maufras, responsable du chantier des Carmes. La présence d’amphores de Lipari, une île au nord de la Sicile, servant à contenir de l’alun (une pierre aux vertus antiseptiques), renforce l’hypothèse de la tannerie. Les dolia (vases de grandes contenances), dont il ne reste que les fosses, servaient peut-être de bain de coloration pour les peaux. Rien de certain toutefois.

En bordure de la via Domitia, les archéologues n’ont pas été étonnés de trouver des sépultures. À la fois des petits coffres funéraires, contenant des urnes en plomb (la crémation moins efficace qu’aujourd’hui laissait des petits morceaux d’os calcinés), mais aussi l’empreinte d’au moins 4 mausolées. Appartenaient-ils à de riches notables qui souhaitaient au-delà de la mort montrer leur puissance ? "Hélàs, on n’a pas trouvé de débris de monuments, de colonnes ou de statue qui nous auraient informés. On a toutefois un ensemble homogène, en contrebas de la voie, et les mausolées sont adossés à un mur. Il matérialise la limite, mais on ne sait pas sa hauteur. Peut-être était-ce un simple muret pour s’isoler de l’eau de ruissellement qui doit s’écouler sur la via Domitia ?", s’interroge Michel Piskorz, qui fouille spécifiquement ce secteur. Reste là encore l’espoir que la fouille des puits réponde aux questions.