Mas d'Azil (France) : Vers une relecture de la grotte

Vers une relecture de la grotte du Mas d'Azil

Source -http://www.ariegenews.com/ariege/histoire_patrimoine/2012/44894/vers-une-relecture-de-la-grotte-du-mas-d-azil.html

Avec 2000 fouilles archéologiques par an sous sa responsabilité, quand le président de l’Institut National de Recherches Archéologiques Préventives (INRAP) se déplace sur site c’est que la découverte est importante.

Ce matin, Jean-Paul Jacob, président de l’INRAP, s’est rendu accompagné des spécialistes les plus pointus en matière de géo-archéologie et de préhistoire à la grotte du Mas d’Azil.

Une grotte unique au monde, site éponyme d’une culture succédant au paléolithique supérieur: l’Azilien, qui se caractérise par une multitude de matériel mobilier (harpons, grattoirs, pointes) et dont l’art est représenté par des galets peints.

Cette grotte est aussi ouverte au tourisme, on peut y découvrir une succession complexe de salles, galeries profondes qui ont aussi livré, notamment au Magdalénien, art pariétal, mobilier, industries et vestiges humains.

La commune du Mas d’Azil, maître d’ouvrage des opérations, a décidé de réaliser d’importants travaux de réhabilitation avec le réaménagement du bâtiment d’accueil et du parcours de la visite.

Des diagnostics archéologiques ont été effectués lors de fouilles préventives avant de faire intervenir les différents corps d’état.

«On pensait tout savoir sur cette grotte largement fouillée depuis 1860» avoue Marc Jarry, responsable scientifique à l’INRAP.

La première phase de recherche au niveau de la tranchée traversant la route a confirmé l’état des lieux (matériaux découverts issus du remaniement de sa construction).

En revanche le diagnostic réalisé à l’emplacement du futur bâtiment d’accueil vient de mettre au jour une exceptionnelle stratigraphie de plusieurs mètres de haut intacte dont le mobilier a fait l’objet d’une datation au carbone 14.

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 Ces découvertes exceptionnelles vont certes freiner les travaux d’aménagement mais elles permettent de donner une dimension internationale au site qui au regard des premiers résultats serait nettement plus ancien: il daterait des premiers hommes modernes, les Aurignaciens (35-38 000 ans av JC).

«Les grottes apportent beaucoup d’information car elles vont piéger l’histoire du paysage de par leur forme et les sédiments qu’elles contiennent et ici l’enregistrement sédimentaire est particulièrement intéressant car nous avons un environnement quasi complet de la cavité quand les glaciers se sont formés au Quaternaire avec un apport important de sédiments» explique Laurent Bruxelles, Géo-archéologue à l’INRAP.

Les plus anciennes occupations, sous le niveau des crues, sont pour la plupart reportables à l’Aurignacien, alors que le Magdalénien succède à ces inondations qui ont ennoyé toute la grotte.

«Cet enregistrement d’évènements, notamment ces crues qui n’avaient jusqu’ici pas été perçues, est un jalon important de l’histoire de la grotte et de ses habitants. On va pouvoir extrapoler ce modèle du pied des Pyrénées à la Garonne»

Les résultats de ces études permettent donc de caler une chronologie précise et d’affirmer que les Aurignaciens, réputés pour ne pas habiter les grottes profondes où ils ne font, au mieux, que passer (voir à Chauvet), ont occupé la grotte du Mas d’Azil.

«C’est inédit! On a retrouvé la présence de faune (carcasses de renne, bison, cheval) dont manifestement les os ont été broyés (pour en extraire de la moelle), pilés et brûlés, des silex, de l’ocre (traitement des peaux), résine d’ambre (perles), autant de preuves que cette cavité profonde était occupée.

Ce niveau aurignacien a été piégé par l’eau  et préservé. Cette eau agressive, capable de dissoudre le calcaire, a creusé d’autres cavités, d’autres grottes qui une fois que le niveau de l’Arize a baissé, ont été occupées par les Magdaléniens et ont servi de support à leur art
» poursuit Marc Jarry pour qui ces découvertes contribuent à la compréhension de la grotte et la réécriture de son histoire.

De quoi aussi remettre certains écrits à jour car en leurs temps André Leroi-Gourhan ou Robert Simonet, dans les années 50, avaient signalé cette découverte.

Pour Michel Vaginay, conservateur régional de l’archéologie à la DRAC, il est indispensable de poursuivre les programmes de recherche sur la grotte du Mas d’Azil en partenariat avec l’INRAP mais aussi avec l’université de Toulouse Le Mirail dont l’unité de recherche TRACES (UMR 5608) participe d'un vaste programme de recherche engagé sur les collections et archives anciennes.

Avec quelques mètres carrés de matériel archéologique, l’histoire du site est en passe d’être revisitée.

Les élus sont conscients de cette chance de pouvoir renouveler l’intérêt de la grotte, reste maintenant à réfléchir au projet muséal pour restituer au grand public les résultats scientifiques de ces travaux, sachant que rien n’est encore fixé car on n’est pas à l’abri d’une autre surprise!
L’immense réseau de galeries du Mas d’Azil n’a pas encore livré tous ses secrets.

Les travaux se poursuivent jusqu’au mois de juin. Ils seront interrompus jusqu’aux journées du Patrimoine au mois de septembre avant de reprendre en octobre.

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