L’Homo sapiens a un développement plus lent que son ancêtre néandertalien
Source : http://www.lemonde.fr/planete/article/2010/11/15/l-homo-sapiens-a-un-developpement-plus-lent-que-son-ancetre-neandertalien_1440497_3244.html#xtor=RSS-3208
Ici, la représentation d'un homme de Néandertal au Musée de la préhistoire des Eyzies-de-Tayac, en Dordogne.AFP/PATRICK BERNARD
L'Homo sapiens devient adulte plus lentement que son ancêtre l'homme de Néandertal, selon une recherche euro-américaine publiée lundi 15 novembre aux Etats-Unis et qui s'appuie sur une nouvelle analyse de dents des deux espèces à l'aide de rayons X très puissants.
Cette découverte laisse penser que le fait que les humains aient un développement plus lent et une enfance plus longue est un phénomène récent et unique à notre espèce dans l'évolution, expliquent ces chercheurs, dont la communication paraît dans les Annales de l'Académie nationale américaine des sciences (PNAS). Selon eux, ce trait pourrait avoir donné aux premiers humains un avantage dans l'évolution sur l'homme de Néandertal, disparu depuis près de 30 000 ans pour des raisons encore obscures.
"DE REMARQUABLES TÉMOINS"
"Les dents sont de remarquables témoins de l'évolution dans le temps, qui enregistrent chaque jour de croissance, un peu comme les cercles des arbres révèlent leur pousse annuelle", note Tanya Smith, professeure adjointe de biologie de l'évolution humaine à l'université Harvard (Massachusetts), une des coauteurs de cette étude. "Nos premières molaires contiennent même ce qui correspond à un minuscule certificat de naissance qui permet aux scientifiques de calculer très exactement l'âge d'un enfant au moment de sa mort", précise-t-elle dans un communiqué.
Une comparaison des premiers humains avec d'autres primates montre que ces derniers avaient une gestation plus courte, une enfance plus brève, un âge de reproduction plus précoce et une durée de vie dans l'ensemble moins longue. Mais il reste très difficile de déterminer à quel moment exact ces changements dans le rythme de développement se sont produits, depuis que les hominidés et les primates non-humains, – en particulier le chimpanzé, notre plus proche cousin – ont divergé dans l'évolution, il y a six à sept millions d'années.
CROISEMENTS AVEC LES HUMAINS
Tanya Smith et ses collègues de l'Institut Max-Planck d'anthropologie de l'évolution, en Allemagne, ont notamment montré que la pousse des dents chez les jeunes néandertaliens était nettement plus rapide que chez les premiers groupes d'humains modernes qui ont quitté l'Afrique il y a entre 100 000 et 90 000 ans. Cette recherche vient conforter d'autres études qui ont mis en évidence l'existence de différences subtiles dans le développement entre l'Homo sapiens et son plus proche parent, l'homme de Néandertal.
L'étude des chercheurs de l'Institut Max-Planck, publiée le 8 novembre, montre que le cerveau des néandertaliens et celui de l'homme moderne, similaires à la naissance, avaient un développement très différent dès la première année de la vie. Ces variantes observées tôt dans le développement du cerveau humain reflètent probablement des changements dans les circuits et branchements cérébraux internes qui comptent le plus pour les capacités cognitives et l'émotion, selon ces chercheurs. Il est de ce fait improbable que les néandertaliens percevaient le monde comme les humains, selon eux.
Le séquençage complet du génome de l'homme de Néandertal, publié en mai, qui a révélé des croisements avec les humains et montre une très grande similitude génétique entre les deux espèces, a aussi mis en lumière des indices qui mettent en évidence des différences dans le développement du crâne et du squelette.