El Eulma (Algérie) : Nouvelles découvertes préhistoriques

Djamel Alilat

Source - http://www.elwatan.com/hebdo/magazine/tresors-insoupconnes-20-08-2016-327187_265.php

Sans titre 1 2617984 465x348De nouvelles découvertes préhistoriques viennent d’être mises au jour par une équipe pluridisciplinaire de chercheurs dirigée par le docteur Souhila Merzoug, maître de recherche au Centre national de recherches préhistoriques, anthropologiques et historiques (CNRPAH) sur le site dénommé Medjez II.

Situé à la sortie est de la ville d’El Eulma, ce site capsien, de type escargotière, avait déjà livré dans les années soixante plusieurs découvertes majeures comprenant des pierres figures, des plaquettes gravées, une industrie lithique et osseuse, des restes de faune et des restes humains.

L’une des découvertes-clés des nouvelles campagnes de fouilles menées depuis 2013 par l’équipe du CNRPAH est la mise en évidence de sols d’occupation avec des structures anthropiques qui indiquent que, contrairement à ce que l’on croyait jusque-là, les populations du Capsien (entre 10 000 et 7 000 BP) avaient des habitats structurés. «Nous avons découvert lors de nos campagnes de fouilles, des structures de cabanes, des sols d’habitats aménagés, des foyers et des fosses de rejet qui indiquent que nous sommes en présence d’habitats structurés contrairement à ce que l’on pensait», dit Souhila Merzoug.

Cette année, ce sont deux découvertes importantes qui viennent s’ajouter au palmarès de cette équipe d’archéologues composée d’une trentaine de chercheurs et d’étudiants : une sépulture humaine et la «sépulture » d’un animal quadrupède.

Cette année, nous avons découvert la sépulture d’un enfant que l’on commence à peine à dégager, ainsi qu’une fosse contenant un animal entier, en dépôt primaire, dont le mode d’enfouissement suggère un geste intentionnel probablement d’ordre rituel. L’animal est un jeune bovidé, probablement un mouflon à manchettes.

Pour rappel, le seul lieu où l’on a découvert un animal entier enterré en dépôt primaire est le site d’Afalou pour une période plus ancienne, l’Iberomaurusien. Il s’agissait d’un macaque déposé dans une sépulture humaine», selon Souhila Merzoug.

De plus, Louisa Aoudia, docteur en paléoanthropologie, attachée au CNRS, laboratoire de Nanterre, apporte les précisions suivantes : «C’est vraisemblablement un animal qui a fait l’objet d’un geste funéraire et qui a été déposé dans une position qui imite celle d’un être humain. Ce qui est surprenant pour un animal est qu’il a été mis sur le dos avec les quatre membres en flexion.

Cela est tout à fait similaire à ce qu’on trouve dans les sépultures humaines.» Concernant les autres aspects de la culture matérielle de Medjez II à savoir les industries lithique et osseuse, Rahma Belanbri et Samia Aouimeur, attachées de recherche au CNRPAH et spécialistes en technologie osseuse et lithique, évoquent la richesse et la complexité des modes de production des outils trouvés et dont le fonctionnement de certains restent encore à déterminer par les études en cours.

Ces découvertes, en cours d’analyse, vont permettre aux chercheurs de comprendre le mode de vie de ces populations capsiennes qui étaient des chasseurs d’antilopes bubales, d’aurochs et de gazelles, des cueilleurs et des collecteurs d’escargots.

«Toutes ces analyses que nous effectuons avec divers spécialistes et laboratoires vont nous permettre de mieux connaître le mode de vie des populations du Capsien. Ces analyses vont être complétées par l’étude des pollens, des macro-restes végétaux et des charbons de bois qui vont nous donner les essences de bois que l’on trouvait à cette époque et connaître le climat et l’environnement dans lequel vivaient les Capsiens, précise encore Souhila Merzoug.

Lors de notre passage ce samedi sur le site, les travaux se poursuivaient d’arrache-pied pour dégager les sépultures et récolter un maximum de données et de matériaux à analyser. Cependant, situé au bord d’une route très fréquentée, le site a besoin d’être protégé comme l’indique toutefois Souhila Merzoug.

Les  travaux de labours arrachent les couches supérieures, perturbant ainsi les dépôts archéologiques en place.  Medjez II est un site clé pour la compréhension de la culture capsienne et à ce titre il serait très louable de l’aménager et de le protéger », conclut l’archéologue.