Clermont Ferrand (France): Mise au jour des vestiges d’un théâtre gaulois

La mise au jour des vestiges d’un théâtre, sur le territoire de la commune, invite à réécrire l’histoire

Patrick Ehme

Source - http://www.lamontagne.fr/auvergne/actualite/departement/puy-de-dome/2012/03/31/la-mise-au-jour-des-vestiges-dun-theatre-sur-le-territoire-de-la-commune-invite-a-reecrire-lhistoire-1131906.html

 648097.jpeg Les vestiges témoignent de l’importance d’une culture authentiquement gauloise. Credit : photo d’archives rodolphe goupil

L’Auvergne, berceau de la Gaule et Corent, cité majeure pour nos ancêtres Arvernes, les découvertes récentes accréditent la thèse et l’histoire se réécrit au grand jour.

Les Gaulois, on l'a dit, ont beaucoup appris des envahisseurs transalpins qui, durant près de cinq siècles, ont marqué d'une empreinte durable la terre de nos ancêtres.

Pour autant nos aïeux aux bacchantes légendaires n'étaient pas seulement d'irréductibles forts en gueule, rustres et bagarreurs. Leur société, pour moins évoluée que celle de l'empire romain n'en était pas moins fort élaborée et portée sur les arts, le débat politique et… le théâtre !

Une des dix 
plus importantes découvertes archéologiques 
de 2011

En témoigne l'étonnante découverte, faite en septembre 2011, des vestiges d'un hémicycle en bois sur le site de l'ancienne cité gauloise de Corent, à quelques kilomètres de Clermont-Ferrand. Les « restes » d'une construction – dont l'origine a été évaluée à 90 et 70 avant J.-C. par les archéologues – en maints points semblables à l'« orchestra », parterre où se tenaient les notables, des théâtres gallo-romains.

Une mise au jour qui tendrait à prouver qu'avant même que les légions romaines et, avec elles, édiles et architectes, n'imposent leur culture et leur marque de fabrique à un immense empire, au pied de Gergovie, les autochtones avaient déjà leur « sénat ».

Car, selon Mattieu Poux et son équipe de l'université Lyon II, auteurs de cette découverte, la présence de semblables vestiges dans l'enceinte d'une cité telle que Corent – considérée comme l'une des principales villes du pays arverne – semble accréditer la thèse que l'ouvrage n'avait pas pour seule vocation d'accueillir des spectacles. Selon le chercheur, les gradins, dont des lignes de trous de poteaux en arc de cercle attestent la présence, auraient donc également accueilli des foules conviées à manifestation civiques, politiques ou religieuses.

Les ossements de plusieurs crânes de b'ufs, découverts sur le sol de ce théâtre gaulois, ainsi qu'un grand couteau, autorisent à penser qu'il s'agissait aussi d'un lieu de sacrifices. Observations qui tendent à confirmer la vocation institutionnelle d'un pareil édifice.

Ce bâtiment, résolument gaulois, ne prend tout son sens qu'à la lumière de la proximité d'un autre, trouvé juste à côté, daté lui, de 90 à 160 après J.-C. Postérieur donc à la colonisation romaine. De là à se laisser aller à penser que les constructions gallo-romaines, considérées jusque là comme avant-gardistes d'un type d'architecture appelé à faire école, n'auraient été que les fruits, à peine revus et corrigés, d'une tradition authentiquement gauloise, il n'y a qu'un pas.

Un revers de l'histoire

Un retournement de situation que l'universitaire lyonnais est tout disposé à cautionner, d'autant que des structures de terres et de bois, quelque peu comparables, avaient été découvertes sous l'emplacement même du théâtre gallo-romain d'Alésia (Côte-d'Or).

Ainsi, pour friands qu'ils aient pu être de pantomimes à visées parodiques ou bouffonnes, les Romains n'en auraient cependant pas tout inventé.

Et les Gaulois, injustement minimisés, ne seraient pas qu'une bande d'exubérants « guignols » exclusivement portés sur la guerre, les ripailles ou la gaudriole.

Il s'agirait donc de rendre à Vercingétorix et consorts ce qui n'appartient pas à César, dût-on pour cela réexaminer et réécrire un tantinet l'histoire, au vu de cette découverte considérée par les spécialistes comme l'une des dix plus importantes de l'année 2011.