Cholula (Mexique): Qui est donc Ylamateuhtli ?

De la relativité des figures historiques

Source - http://mexiqueancien.blogspot.fr/2013/03/de-la-relativite-des-figures-historiques.html

Photos : Francisco González-Hermosillo / INAH.

'REINA DE CHOLULA', OLVIDADA EN HISTORIA DE LA CONQUISTA

Source - http://inah.gob.mx/boletines/6-museos-y-exposiciones/6475-reina-de-cholula-olvidada-en-historia-de-la-conquista

Selon qu'on se place du côté des conquérants et des conquis, une même personne peut être considérés comme un traître ou un héros. L'Histoire recèle d'exemples et l'histoire du Mexique ne déroge pas à la règle, surtout lorsqu'il s'agit des valeurs patriotiques ou nationalistes. Si la Malinche est une figure passablement décriée de ce côté de l'océan, elle reste la figure féminine marquante de la Conquête, qui connaît Ylamateuhtli, autrement baptisée Doña María ? Même votre serviteur n'en avait jamais lu un mot ou entendu parler jusqu’à il y a quelques jours.

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Se trata de Ylamateuhtli, bautizada como Doña María, quien jugó un papel decisivo en el ataque español a Cholula en 1519.

Qui est donc Ylamateuhtli ? Les rares occurrences de son nom apparaissent dans des chroniques des protagonistes de la Conquête ou dans le Codex de Cholula (1). De fait elle apparaît sous le nom de Doña Doña María suite à son baptême. Bernal Díaz del Castillo, chroniqueur polémique dont la participation à la Conquête a été depuis remise en question, la présente comme la veuve d'un cacique d'un altepetl de faible importance : Tenanquiahuac.

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Ylamateuhtli o Doña María, Códice de Chulula.

Ayant eu vent de la volonté des Cholultèques d'attaquer l'expédition espagnole et ses alliés, la vieille femme s'approcha de Malintzin pour lui conseiller de se réfugier chez elle. Elle lui proposa également de se marier avec son fils. Malintzin rapporta immédiatement l'information à Cortés qui décida de punir durement cette acte de trahison (2). En effet, les dirigeants de Cholula avaient juré allégeance au roi d'Espagne. Dès lors, un acte de trahison à la couronne devait être sévèrement châtié. Le massacre de Cholula fut un des épisodes les plus sombres de la Conquête et marqua durablement les esprits. Telle était l'intention de Cortés : il fallait provoquer une prise de conscience dans les populations locales et garantir ainsi les alliances effectuées préalablement.

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Massacre de Cholula


Cholula est une ville quasiment deux fois millénaires lorsque Cortés. Elle est fièrement indépendante et avait la réputation d'être la plus commerciale de toute la Mésoamérique. Elle était un centre d'échanges de bien de tout premier ordre et passait pour une des plus riches. Enfin elle était un lieu de pèlerinage important à Quetzalcoatl : les dirigeants mésoaméricains devaient s'y rendre afin de récupérer leurs insignes de pouvoir. Il s'agissait donc d'une ville stratégique, tant d'un point de vue économique que religieux.

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Escenas del Códice de Cholula, que muestra los acontecimientos de la conquista de la urbe prehispánica de Cholula.

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El Códice de Cholula, única representación pictográfica en la que se muestra a Ylamanteuhtli y se menciona su nombre indígena

Comme vous l'aurez compris, Ylamateuhtli n'est pas vraiment passé à la postérité du côté mexica. En revanche, Cortés sut se montrer généreux avec elle et lui concéda le titre de reine de Cholula. Là encore, cet anoblissement n'est pas innocent : il permit à Cortés de s'appuyer sur de nouveaux lignages autochtones. Les dix enfants de Doña María occupèrent des fonctions importantes pendant la Colonie. Il est en revanche peu sûr que cette femme ait mesuré toutes les conséquences de son acte, ou comment une décision a priori insignifiante peut influer la grande Histoire.


(1) González-Hermosillo A., Francisco y Luis Reyes García (2002). El Códice Cholula. La exaltación testimonial de un linaje indio. Mexico : Instituto Nacional de Antropología e Historia ; Centro de Investigaciones y Estudios Superiores en Antropología Social ; Gobierno del Estado de Puebla.

(2) Díaz del Castillo, Bernal. (1939). Historia verdadera de la conquista de Nueva España. I, 286-287. Mexico: Editorial Pedro Robredo.