Bresles (France) : Vestiges d'un village médiéval et d'un habitat antique

INRAP

Source - https://www.inrap.fr/vestiges-d-un-village-medieval-et-d-un-habitat-antique-bresles-oise-17312

Les fouilles menées à Bresles au lieu-dit de « la Basse Couturelle » précèdent la construction par Aréfim de deux entrepôts de logistique. La Drac Hauts-de-France a émis deux prescriptions de fouille sur une surface totale de 11 hectares. La première fouille, menée début 2022 sur 3,9 hectares, a livré les vestiges antiques d’un possible relais routier installé le long d’une voie et d'un cimetière du haut Moyen Âge le long d’une autre voie. Trois monuments funéraires de l’âge du Bronze ont également été mis au jour. La deuxième fouille, débutée fin 2022 et toujours en cours, s’étend sur 7 hectares. Elle s’attache aux vestiges d’une partie d’un village médiéval dont l’apogée se situerait à l’époque carolingienne et au début du Moyen Âge classique (IXe au XIe siècles).

Bresles 1Vue aérienne d’une partie de la deuxième tranche de fouille du site de Bresles, « la Basse Couturelle », montrant notamment une partie des vestiges des voies antique, médiévale, moderne et contemporaine.  © Vincent Dargery, SDAO

La voirie à travers les âges

Une série de fossés parallèles représente les vestiges d’une voie antique plusieurs fois remaniée qui reliait sans doute deux axes plus importants partant de Beauvais. Plusieurs autres voies traversent les emprises des fouilles et recoupent le tracé de la voie antique. L’une, globalement orientée sud-nord, correspond à l’ancien chemin de Monchy, disparu à la fin des années 70, qui depuis Bailleul-sur-Thérain permettait de rejoindre d’autres chemins menant à Fay-Saint-Quentin ou Fouquerolles. Ce chemin se superpose en partie au niveau des fouilles avec une autre voie qui semble plus ancienne. Cette dernière, probablement d’origine médiévale, forme, à la jonction des deux tranches de la fouille, un important carrefour. C’est au nord, le long de cette voie, que vient s’installer le cimetière carolingien tandis qu’au sud se développe une agglomération rurale médiévale particulièrement dense. Cette agglomération se trouve à 1,6 km à l’est du château et de l’église de Bresles, monuments tous deux accolés et situés au cœur du village actuel.

Bresles 2Plan du site (avril 2023). © Sébastien Hébert / modifié par Romain Barbé et Germain Cuvillier, SDAO

Ces voies correspondent à de simples chemins de terre partiellement empierrés, bordés d’un ou deux fossés. Elles ont livré des séries d’objets métalliques qui nous renseignent sur la vie des personnes qui ont fréquenté ces voies au fil du temps.

Un village médiéval, VIIIe-XIIe siècles

La fouille actuelle révèle les vestiges d’une occupation médiévale agricole qui semble se développer à partir de la fin de l’époque mérovingienne (VIIIe s.) et surtout à l’époque carolingienne (VIIIe-Xe s.) jusqu’au début du Moyen Âge classique (XIIe s.). Bâtiments sur poteaux de bois plantés avec parois de torchis, silos creusés, fosses diverses, fours culinaires, puits, fossés constituent les principales typologies des structures découvertes auxquelles s’ajoute une série de fonds de cabane systématiquement associés à des aménagements internes caractéristiques d’une activité textile artisanale sur le site. La présence de broches et poinçons en os et celle de lissoirs en verre confirment cette activité. Les études des autres objets recueillis (fragments de céramiques, éléments métalliques, charbons, graines, os, etc.) permettront aux archéologues de dater plus précisément les vestiges découverts et de reconstituer une partie du quotidien des habitants de ce village.

Bresles 3Fond de cabane bordant la voie médiévale - © Louis Florin Inrap-

Actuellement en cours de fouille, la partie la plus dense de l’agglomération n’est pas totalement dégagée. S’agit-il bien d’un habitat groupé ou plutôt de plusieurs unités agricoles distinctes ? Y a-t-il eu une évolution dans l’organisation de l’habitat ? On observe déjà un alignement de plusieurs cabanes de tissage le long de la voie probablement médiévale.

Des vestiges funéraires à différentes époques

L’âge du Bronze (-2 200 à -800) est également représenté, sur l’emprise (première tranche de fouille) par trois enclos circulaires de taille différente. Il s’agit d’anciens monuments funéraires non contemporains, composés d’un fossé circulaire ouvert ou non, seul vestige d’un tertre où certains morts étaient enterrés. L’un des tertres était associé à deux sépultures à incinérations.
Les fouilles (seconde tranche) ont été l’occasion d’exhumer un petit lot de tombes à crémation, appartenant à un cimetière du second âge du Fer (-450 à -50), localisé au sud-est de la voie antique. Les restes incinérés des défunts étaient déposés dans de simples fosses et accompagnés d’offrandes funéraires dont la fonction était d’alimenter l’âme des défunts.

Regroupées à l’ouest dans l’emprise (première tranche), quatre sépultures mérovingiennes, pourraient correspondre à un petit cimetière familial lié à une ou plusieurs unité(s) agricole(s). Ces défunts ont été inhumés avec quelques effets personnels (ceinturon, simple boucle de ceinture, couteaux, etc.).

L’ensemble funéraire le plus spectaculaire est un cimetière carolingien qui a livré plus d’une centaine de tombes réparties sur une étroite parcelle contiguë à une voirie qui desservait le village. Les tombes de la première phase d’utilisation du cimetière sont creusées côte-à-côte en deux rangées parallèles et présentent une orientation O/E. La seconde phase se traduit par l’implantation, selon un axe N/S, de quelques sépultures à l’est des rangées de tombes précédentes. La majorité des inhumations se faisait en pleine terre (sans mobilier ni accessoire vestimentaire), les corps enveloppés dans un simple linceul. Les défunts présentent des positions différentes d’ensevelissement et correspondent aussi bien à des adultes qu’à des enfants probablement regroupés en famille dans certains cas. L’étude ostéologique de cette population a révélé de nombreuses pathologies en lien avec une activité physique intense et des épisodes de carences alimentaires. Aucune trace de chapelle ou d’église n’a été découverte, mais elle pourrait se situer au nord hors du champ d’investigation des fouilles.
Enfin, quelques sépultures mal conservées, sans mobilier, potentiellement carolingiennes, ont été découvertes le long des voies antique et médiévale lors de la seconde tranche de la fouille.