Bibracte (France): 2014, une campagne de fouilles fructueuse

Source - http://www.bibracte.fr/fr/magazine/une-fructueuse-campagne-de-fouilles_01_03.html

Capitale du puissant peuple des Éduens au Ier siècle avant notre ère, le site de Bibracte accueille chaque année depuis 1984 des archéologues venus de toute l’Europe : entre juin et septembre 2014, plusieurs équipes ont poursuivi la lente exploration des vestiges de la ville gauloise, au cours de chantiers de fouilles et de prospections géophysiques principalement concentrés dans le secteur du Theurot de la Roche et du Parc aux Chevaux. Une mosaïque, des édifices insoupçonnés, le plan d’une grande maison à la romaine… Bilan d’une campagne fructueuse.

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Fig. 1 : Plan du mont Beuvray avec localisation des vestiges et des chantiers de fouille de la campagne 2014.; (© Bibracte, Arnaud Meunier).

THEUROT DE LA ROCHE 

Une maison à pans de bois sur le Theurot de la Roche

Fouilles dirigées par Thierry Luginbühl et Pascal Brand de l’Institut d’archéologie et de sciences de l’Antiquité de l’université de Lausanne. 

L’équipe de l’université de Lausanne a poursuivi l’exploration du Theurot de la Roche, un des trois sommets du mont Beuvray. À proximité immédiate d’un bâtiment en pierre à plan centré interprété comme un édifice de culte par comparaison avec des constructions gallo-romaines, la campagne a permis le dégagement d’un nouveau bâtiment, à ossature de bois cette fois. 

Il s’agit d’une construction de plan plus habituel pour Bibracte, tel qu’on en rencontre dans trois autres édifices du secteur et dans les maisons-ateliers du quartier de la Côme Chaudron : une pièce unique de 4 x 6 m, fermée sur trois côtés par des parois armées de puissants poteaux de bois  verticaux, et qui s’ouvre en façade vers l’aval. La destruction brutale du bâtiment par un incendie il y a deux mille ans a permis sa fossilisation et explique la netteté inhabituelle de ses vestiges.

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Fig. 2 : Bibracte – Mont Beuvray (Morvan, Bourgogne).  Theurot de la Roche : le tracé d’une maison à ossature bois du Ier siècle avant notre ère est révélé  par l’impact dans le sous-sol rocheux des fosses de calage des poteaux verticaux qui en constituaient l’armature (Fouille de Pascal Brand et Thierry Luginbühl, université de Lausanne. © Université de Lausanne).

Une construction excavée insolite

À moins de 30 m en contrebas du bâtiment précédent, l’équipe suisse a entièrement dégagé un autre édifice bien plus insolite : une vaste pièce rectangulaire de 9,35 x 11 m excavée de près de 2 m dans le rocher. Avec ses murs de pierre soigneusement bâtis, cette construction qui date certainement des derniers temps de l’oppidum reste une énigme : on n’y a retrouvé aucune trace liée à son usage, ni aménagement hydraulique, ni mobilier évocateur, ni même de vestiges de toiture effondrée. De plus, on n’en connaît pas d’équivalent sur les autres sites de Gaule : seul Bibracte fournit une construction similaire, le bâtiment PS1, mis au jour en 2011 à 70 m de là (PS1 présente les mêmes dimensions et la même orientation, mais comporte des contreforts d’angle circulaires).

Au total, le Theurot de la Roche, dont la fouille s’achèvera en 2015, aura livré une demi-douzaine de constructions répondant à des formes et des modes de construction variés : cela montre que la fonction de ce secteur de l’oppidum ne se réduit pas simplement à celle d’espace sacré.

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Fig. 3 : Bibracte – Mont Beuvray (Morvan, Bourgogne).  Theurot de la Roche : construction excavée  de 9,35 x 11 m datée des derniers temps de l’oppidum de Bibracte,  dont la fonction demeure inconnue. Vue vers l’ouest.  (Fouille de Pascal Brand et Thierry Luginbühl, université de Lausanne. © Bibracte, A. Maillier).

PARC AUX CHEVAUX

Une nouvelle mosaïque dans la grande domus du Parc aux Chevaux

Fouille du chantier-école de Bibracte, dirigée par Chiara Martini, archéologue et chargée d’actions éducatives, Bibracte EPCC.

Les adolescents du chantier-école dirigé par Chiara Martini (Bibracte EPCC) ont, cette année, concentré leurs efforts sur la fouille de la cour à péristyle et des pièces attenantes d’une demeure aristocratique des derniers temps de Bibracte. Son plan typique des grandes maisons romaines, avec atrium, cour à péristyle, petits thermes privés, cortège de pièces… et sa très grande étendue (3600 m2), font de cette domus une construction singulière en Gaule. Elle montre que l’élite du peuple éduen était fascinée par le modèle culturel romain au point de recruter architecte et artisans en Italie pour se faire construire une résidence adaptée au climat méditerranéen sur un sommet du Morvan.

Jusqu’à présent, les fouilles n’avaient livré que peu de traces de la décoration de la maison : enfouie dans le sol acide du mont Beuvray pendant deux mille ans, la chaux des enduits qui portaient les peintures murales et qui servait de liant au béton des sols maçonnés s’est presque totalement dissoute. Cela a donc été une heureuse surprise que de retrouver sur quelques mètres carrés des traces substantielles d’une mosaïque dans une pièce que l’on interprète comme une vaste salle à manger (triclinium). Malgré la dégradation des tesselles de calcaire et de schiste, le décor géométrique blanc sur fond noir est bien lisible : il s’inscrit parfaitement dans le style en vogue à  l’époque de sa construction, autour du changement d’ère. 

Cette découverte confirme que  les échos de la mode romaine parvenaient sans retard jusqu’à Bibracte. Le pavement a été déposé sur une bande de 4 x 1,7 m, cet automne, par Dominique Lacoste (Bibracte EPCC) avec l’aide de l’atelier de restauration des mosaïques de Saint-Romain-en-Gal. Il sera restauré avant d’être présenté au musée.

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Fig. 4  : Bibracte – Mont Beuvray (Morvan, Bourgogne).  Parc aux chevaux : vue zénithale des vestiges d’un pavement en mosaïque dans le triclinium   d’une grande maison romaine datée des alentours du changement d’ère.  (Fouille de Chiara Martini, Bibracte. © Bibracte, Antoine Maillier).

PART.2