ACADIE (Canada) : Les Acadiens du marais de Belle-Isle

 

Échos de la grande Acadie

Un site riche en histoire

Par: NE - Courrier de la Nouvelle-Écosse

Source : http://www.capacadie.com/actualites-regionales/2010/11/15/un-site-riche-en-histoire

 

Une photo du chantier école de l’Université Sainte-Anne, en 2005. Les étudiants dégagent les vestiges de deux grandes maisons acadiennes dont l’occupation remonte aux premières décennies du 18e siècle. (GRACIEUSETÉ: Marc Lavoie)

NOUVELLE-ÉCOSSE - Situé à 11 kilomètres en amont d’Annapolis Royal, le marais de Belle-Isle, terre d’accueil des premiers Acadiens, s’étend sur une superficie de 700 hectares et bénéficie maintenant d’une protection du gouvernement de la Nouvelle-Écosse.

Marc Lavoie, archéologue et professeur à l’Université Sainte-Anne, nous explique que les documents historiques sur les Acadiens qui vivaient dans le marais de Belle-Isle sont très peu nombreux et qu’il existe beaucoup de lacunes dans l’information disponible. 

C’est à la fin des années 1960 que les archéologues et les historiens ont commencé à s’intéresser au site du marais de Belle-Isle afin de tenter de retrouver des traces des Acadiens d’avant la Déportation. 

En 1970, Brian Preston, archéologue de la province, débute des fouilles dans la grande région d’Annapolis Royal et croit découvrir des vestiges de l’occupation acadienne. Des fouilles réalisées l’année suivante viennent confirmer ces suppositions. Des fouilles plus fines et plus détaillées sont entreprises à partir des années 1980.

Toutes ces recherches ont permis de beaucoup mieux connaître le peuplement acadien de la région. 

«Grâce à l’archéologie, on a pu retracer les modes de vie des Acadiens, leur statut économique, et bien d’autres aspects, rapporte M. Lavoie. Le site est très ancien et des Acadiens y étaient déjà installés en 1650.» 

Marc Lavoie nous explique que l’histoire de cette région est assez particulière. À cette époque, les terres appartenaient généralement à des seigneurs. Mais des documents écrits montrent qu’à partir de 1654, les habitants du marais ont commencé à acheter des terres de la couronne, à une certaine Jeanne Motin-LaTour. Cela a permis aux familles acadiennes de devenir totalement autonomes dès le 17e siècle, ce qui était très rare pour l’époque. 

Ces familles ont fait preuve d’ingéniosité pour assécher les marais à l’aide d’aboiteaux et y développer l’agriculture. Les Acadiens vivaient en fait très bien. Ils échangeaient régulièrement leur surplus de récolte avec la Nouvelle-Angleterre contre des denrées et d’autres biens qu’ils ne produisaient pas eux-mêmes. 

Au 18e siècle, Belle-Isle était devenu assez grand pour devenir une paroisse, la paroisse Saint-Laurent. Des traces funéraires dans le cimetière Saint-Laurent dès 1707 ont été trouvées dans les rares documents écrits du 18e siècle. Les archéologues estiment qu’à cette époque une trentaine de familles acadiennes habitaient le marais de Belle-Isle. Elles ont ainsi conservé leur autonomie jusqu’en 1755. 

Le marais de Belle-Isle est donc un site riche en histoire. Les archéologues ont même pu découvrir que le premier-né acadien, Mathieu Martin, a vu le jour à l’extrémité ouest du marais de Belle-Isle en 1636 ou 1637. 

«L’archéologie nous aide beaucoup et le portrait qu’on est capable de dresser maintenant est très intéressant, ajoute Marc Lavoie. Les ruines des maisons acadiennes n’ont jamais été touchées après qu’elles ont été détruites entre novembre ou décembre 1755.» 

 

Vue d’ensemble du marais de Belle-Isle. (GRACIEUSETÉ: Robert Surette)

Actuellement, Robert et Diane Surette sont les seuls Acadiens à habiter sur le site. C’est après avoir acheté des terres sur le marais qu’ils ont découvert que c’était la terre de leurs ancêtres et ils ont contribué à la sauvegarde du marais. 

Depuis les années 2000, on commence à se préoccuper davantage de la préservation des sites dans le marais. En effet, d’autres activités s’y déroulent et certains sites ont été endommagés voire détruits. 

Le Comité de mise en valeur du marais de Belle-Isle dont fait partie Marc Lavoie travaille fort pour la préservation et la mise en valeur des vestiges archéologiques du site. Le travail acharné de ce comité a mené à la protection du marais par le gouvernement de la Nouvelle-Écosse dont l’annonce a été faite le 25 octobre. Actuellement, un quart du marais est ainsi protégé. 

«Le marais de Belle-Isle est un endroit extrêmement important pour les Acadiens, c’est le berceau de l’Acadie, conclut Marc Lavoie. C’est à cet endroit que les Français se sont adaptés et ont changé pour devenir les Acadiens.» 

Il est maintenant prévu de constituer un comité pour la gestion du marais et assurer ainsi, à long terme, sa protection totale.