LA REUNION: repérage de vestiges de sites d'esclaves marrons

Ludovic Grondin

Source -http://www.zinfos974.com/Un-avion-radar-pour-detecter-les-sites-de-vie-des-esclaves-marrons_a43813.html?com

Depuis 2010 et la découverte de vestiges à Saint-Paul, l'archéologie à la Réunion prend son envol. Profitant d'une mission de cartographie du relief sur la zone incendiée du Maïdo, les archéologues locaux pourraient bien faire d'une pierre deux coups : un projet inédit de repérage de vestiges de sites d'esclaves marrons dans les Hauts de l'île est dans les cartons.

Un avion radar en appui de l'oeil humain : c'est tout l'espoir que portent en elle la Direction des affaires culturelles océan Indien et le Parc national. Le concept semble sortit tout droit d'un film de science fiction. Pourtant, le concept d'écho-laser n'est plus à présenter. Il a fait ses preuves et est très utilisé en Europe dans l'élaboration topographique des reliefs. C'est plus dans le domaine de l'appui en recherches archéologiques que son utilisation reste marginale. 

Dans les faits, un avion muni d'un Lidar* effectue des passages en bandes au-dessus du relief. A l'aide d'un laser embarqué sous l'avion, il envoie un faisceau laser au sol pour y calculer la distance entre le sol (la cible) et lui (l'émetteur). "La précision attendue est de l'ordre de moins d'un mètre", affirme Edouard Jacquot, conservateur régional à la DAC-OI. Mieux, cette précision pourra être affinée avec d'autres passages au-dessus des zones concernées. 

Cette opération de télé-détection permettra, in fine, l'établissement d'une carte 3D du relief. Comment, à partir de ces données, repérer des sites où vivaient les esclaves marrons ? La lecture choisie par les archéologues péi consistera à comparer l'ensemble de la cartographie pour y déceler les "anomalies topographiques" commente le spécialiste. Une lecture des données appelée "photo-interprétation". 

Ce procédé a marché en métropole sur différents sites. C'est par exemple le cas sur le site du Mont Beuvray (Massif du Morvan en Bourgogne). La grande inconnue qui inquiète sensiblement les spécialistes locaux réside dans l'opérabilité de ce laser au-dessus d'une végétation tropicale persistante comme dans les Hauts de l'île. 

"Avant la fin 2012" 

Au départ, ce projet a vu le jour suite au deuxième gigantesque incendie du Maïdo, en octobre 2011. L'avion radar devait réaliser un modèle numérique de terrain en haute résolution combiné à des photographies aériennes pour les besoins de la gestion du secteur ayant subi les incendies. Bonne nouvelle, ce quadrillage du relief ne se cantonnera pas à la planèze du Maïdo, mais "on va essayer de détecter tout site susceptible d'avoir accueilli des lieux de vie""Tous les hauts sont intéressants",commente Edouard Jacquot. La zone du volcan est aussi évoquée mais avec moins de certitude pour l'heure. 

Même s'il refuse de s'avancer sur les chances de réussite de cette mission, Edouard Jacquot avance prudemment qu'"il n'est pas attendu des résultats équivalents, sur les sites archéologiques plus discrets des Hauts de La Réunion, à ceux obtenus sur des sites archéologiques de métropole, mais ce sera l'occasion de tester cette technique de détection" pour le moins originale, "complétée par des prospections pédestres sur le terrain". 

Actuellement, c'est plus la phase de validation administrative qui prévaut dans les couloirs de la DAC-OI. La technique est là et à disposition. Si le projet se concrétise, "on espère le faire avant la fin 2012",conclut le conservateur régional. 

*Lidar : LIght Detection And Ranging (ou sondage par laser). Le Lidar utilise de la lumière au lieu d'ondes radio.  

L'exemple de l'utilisation réussie du Lidar au Mont Beuvray : 
En avril 2007, la totalité du Mont Beuvray et des sources de l'Yonne ont fait l'objet d'une campagne de mesure par balayage laser aéroporté, révélant ainsi le modèle du terrain actuel et une foule d'indices sur sa morphologie antique. La mise en œuvre de cette méthode de relevé et le traitement informatique qui en résulte ont permis de transformer le mont Beuvray en "mont Chauve", dégarni de la quasi-totalité de son couvert forestier. 
Cette nouvelle macro-vision de haute résolution dégagée des perturbations végétales, a permis de repérer sur de longues distances l'important chevelu des voies antiques environnant le mont Beuvray, les minières et autres structures ponctuelles. Les programmes de recherches concernant l'environnement du mont Beuvray ont été les premiers bénéficiaires de ce nouvel outil de cartographie numérique en trois dimensions en France.

 4455561-6694203.jpg Un exemple de carte 3D obtenue après les mesures de télé-détection au-dessus du Mont Beuvray